Je m’appelle Olivier Esneu, j’ai 44 ans, je suis marié, père de Mathis, 4 ans et beau-père de Léo 12 ans et milan 14 ans.
Avant mon arrêt de longue durée (ça fait 4 ans aujourd’hui), j’étais professeur de droit à l’université (UPJV) et conférencier en philosophie à l’université pour tous de Beauvais.
J’ai pratiqué pendant plus de 15 ans le sport à haut niveau en tant qu’arbitre national de football (j’ai évolué jusqu’en ligue 2) avant de découvrir mon cancer, quelques semaines après la naissance de mon fils, qui est né le jour de mes 40 ans …
J’ai donc vécu le plus beau jour de ma vie et le pire en l’espace de quelques semaines. Je vous reparlerai un peu plus tard, de cette synchronicité qui n’est peut-être pas due qu’au hasard.
Avant mon cancer
Je trouve que sommes dans un monde où nous manquons de plus en plus de clarté et dans lequel on favorise une existence surchargée, surmenée, sous pression et donc confuse.
La recherche de la performance à tout prix et l’appât du gain contribuent aussi à accélérer ce constat. Du coup, on a tendance à se négliger, à négliger notre monde intérieur en nous éparpillant.
Les nouvelles technologies de l’information et de la communication n’ont fait qu’amplifier cette tendance en modifiant nos manières de penser et d’agir. Elles nous habituent à la vitesse et à la satisfaction immédiate.
La vie moderne finit alors par nous plonger dans une précipitation permanente qui n’est plus propice à la clarté. Elle peut parfois nous conduire droit dans le mur hélas et dans le pire des cas à la maladie …
C’est triste, mais il m’a fallu l’épreuve du cancer pour ouvrir les yeux sur l’absurdité de ma vie.
Avec du recul, je n’ai jamais cru que le cancer voulait me tuer mais plus m’alerter. M’envoyer un signal sur le fait que mon mode de vie n’était malheureusement plus approprié à l’époque.
Il faut souvent une « expérience révélatrice » hélas (comme la maladie, la douleur ou le deuil) pour réaliser que nous ne sommes que de passage.
La confrontation avec la mort est certes porteuse d’angoisse mais elle peut aussi enrichir considérablement notre vie (surtout quand on a la fâcheuse tendance à se laisser pourrir la vie par les petites contrariétés du quotidien).
Mon expérience de l’absurde
Je l’ai vécu quelques semaines après mes 40 ans en étant touché de plein fouet par un cancer de l’œsophage (le cancer des personnes qui fument ou qui boivent selon les statistiques). Ironie du sort : je n’ai jamais fumé ni bu de ma vie.
Et paf ! 6 mois après la naissance de mon fils, ça me tombe dessus (moi qui pensait que ça n’arrivait qu’aux autres…)
J’ai donc voulu savoir pourquoi moi ?
Aucun médecin n’a été capable de me dire pourquoi :
« peut-être un HPV 16 mais en principe dans 90% des cas en moins d’un an cela se résorbe quand vous avez un système immunitaire « normal » ».
Je faisais donc partie des 10% de « malchanceux ».
J’ai alors décidé d’enquêter, donner du sens et j’en suis arrivé au constat d’un cocktail explosif :
- j’avais un rythme de vie effréné,
- j’étais en permanence stressé (notamment au niveau professionnel où j’étais soumis aux nouvelles techniques de management bien souvent basées sur la peur),
- j’ai vécu un épuisement émotionnel (choc émotionnel et stress chronique),
- j’avais sommeil catastrophique
- et mon alimentation complètement négligée.
En restant des années la tête dans le guidon, avec des œillères sans écouter mon corps, je suis donc allé droit dans le mur …
(Lire l’article « En quoi nos émotions impactent notre corps ?« )
J’ai essayé alors de voir la maladie comme une invitation à grandir en mettant en place une introspection générale.
Les médecins ont traité mon corps physique (via la chimio, la radio et une lourde chirurgie) mais il me fallait aussi traiter les corps psychologiques et surtout existentiels.
Ma "délivrance" grâce au cancer
Elle est passée par 5 choses essentielles :
La spiritualité
Même si je suis complètement athée, je me suis tourné vers un ensemble de sagesses traditionnelles anciennes :
- bouddhistes,
- toltèques
- et taoïstes.
Elles m’ont été d’une aide très précieuse pour faire face aux défis du cancer (le sentier aux 8 branches, les 4 accords toltèques, la théorie du Yin et du Yang notamment).
Ainsi que les écrits de grands philosophes : Nietzsche, Schopenhauer, Spinoza, Camus entre autres…
Une régénération énergétique
L’objectif était de réactiver mes méridiens énergétiques (par la réflexologie plantaire, le reiki, la sono thérapie notamment…).
Mais aussi de mettre en place une diététique intelligente car l’alimentation est la base de notre santé (régime cétogène, jeûne, qualité de l’hydratation…) et une pratique respiratoire régulière (respiration abdominale et thoracique) tout comme une activité physique adaptée (beaucoup de marche) et de la méditation.
Un recentrage émotionnel
J’ai dû gérer au mieux mes montagnes russes émotionnelles en faisant entre autres le deuil de ma vie d’avant (et oui, il y a un avant et un après cancer, pour tous les survivants du cancer).
(Lire l’article : « quelles sont ls phases d’acceptation de la maladie ? »)
Je me suis recentré sur l’amour de mes proches (et en particulier sur celui de mon fils), j’ai repris le contrôle de moi-même, je ris et je souris à nouveau à la vie …
Une remise en cause existentielle
Je considère aujourd’hui mon cancer comme une opportunité dans ma vie en matière existentielle.
Je me suis reconnecté à la simple joie d’exister, au simple plaisir de vivre, au pouvoir de l’instant présent, j’accepte de vivre plus lentement, j’essaye de cultiver la « bonne » distance dans mes relations mais aussi par rapport aux événements de la vie.
« Deviens qui tu es »
C’est une formule de Pindare (poète du Vè siècle avant JC), reprise par Nietzsche dans son œuvre qui invite l’Homme à se rapprocher le plus possible de ce qu’il est vraiment.
Selon Spinoza, le philosophe du bonheur, pour atteindre la béatitude (c’est-à-d-dire la joie suprême) « L’être d’un être est de persévérer dans son être ».
Pour atteindre le bonheur, on doit donc être le plus en harmonie avec qui l’on est vraiment. Cela nous impose de faire tomber les masques que nous portons parfois en société.
Conclusion
« On a 2 vies et la 2ème commence quand on se rend compte qu’on n’en a qu’une ».
Cette citation de Confucius extrêmement puissante représente tout à fait la prise de conscience que j’ai eu après mon cancer.
J’ai voulu faire peau neuve en changeant ma façon d’être. La fin de tous les traitements fut pour moi la sortie d’un long tunnel pour sortir de l’ombre et retrouver la lumière.
La synchronicité de la naissance de mon fils et celle de la découverte de mon cancer n’était finalement pas totalement dû au hasard : sa naissance correspond finalement à ma renaissance.
Finalement, mon cancer m’a permis :
- de grandir
- d’évoluer
- de changer radicalement d’état d’esprit de manière plus positive.
Il m’a poussé vers une élévation spirituelle et existentielle.
J’évite désormais de dépenser mon énergie inutilement et quand il faut prendre une hache pour trancher avant qu’une situation se détériore, je le fais (surtout quand ma santé physique ou mentale est en jeu).
La maladie m’a permis de me rapprocher de qui j’étais réellement pour entamer plus sereinement et de manière plus apaisée ma 2ème vie. Un grand merci à la vie !
Note de Lisa
J’ai approché Olivier sur Facebook car j’aimais beaucoup sa philosophie de vie autour de la maladie. Elle rejoint les messages d’espoir que je cherche à faire passer à travers ce site et la manière dont je travaille quand j’accompagne les personnes à accepter et bien vivre avec leur maladie chronique.
Si vous voulez aller plus loin, il a utilisé l’écriture pour se libérer et a sorti un livre : « De l’ombre à la lumière ».
Comme pour tous les témoignages que je propose sur ce site, il n’est nullement ici question d’une quelconque promotion.