Chapitre 13 – En colère contre la maladie

Chapitre 13 – En colère contre la maladie

Dans le chapitre précédent

Dans le chapitre 12,  toujours en plein Déni, je continuais mon stage, ne tenant compte d’aucune des recommandations qui m’avaient été données par les médecins. Je sentais que quelque chose me retenait, de nombreuses émotions cherchaient à sortir mais je tenais bon et ne laissais rien transparaître. C’était comme un couvercle posé sur une marmite bouillonnante. Le résultat est que cela s’exprimait sans cesse par de la fatigue et des crises d’angoisse. Et puis, une émotion commença à émerger, qui devait définir la troisième étape. Je me sentais soudainement terriblement en colère contre la maladie.

En colère contre la maladie

C’est à ce moment là que la Colère a commencé à apparaître. Chacune de ces nuits, une rage sourde montait en moi. Et, face cette Colère qui avait un tel besoin de s’exprimer, se trouvait le vide, aucun coupable direct et matériel contre qui elle aurait pu être déchargée.

Je ruminais donc ma rage et, lorsque je ne pouvais plus la sortir, elle se transformait en crises d’angoisses, où je peinais à respirer. Je dormais peu, mangeais peu et chaque matin, après une nuit plus courte que les autres, se réveillait aussi la peur de ne pas avoir “assez” dormi, suite aux recommandations des médecins (cf chapitre 11 “Les recommandations médicales pour la sclérose en plaques“).

La fatigue était omniprésente. Et elle entretenait mon anxiété permanente.

Un cercle vicieux

J’étais entrée dans un cercle vicieux, sans ne plus trouver aucune porte de sortie : peur de faire une poussée – > angoisse – > colère d’en être arrivée là, d’avoir cette maladie – > insomnie – > épuisement – > peur de faire une poussée … etc

J’annonçais régulièrement à mon tuteur de stage que j’arriverais dans l’après-midi ou que je ne pouvais pas venir travailler ce jour là.

Retour dans le statut de victime

Bien évidemment, il fallut que je lui explique la situation, pour préciser mes nombreuses absences. Et dans les moments où j’étais un peu apaisée et que j’arrivais à aller au travail, je trouvais alors mon réconfort en me réfugiant de nouveau dans mon statut de victime (cf chapitre 8 “Comment sortir de la position de victime ?“). Mon état de fatigue était tel, que j’étais sans cesse désireuse de susciter l’apitoiement chez les autres et, peut-être, de me décharger et de leur donner une partie de toutes ces émotions qui me rongeaient. J’étais tellement en colère contre la maladie.

J’avais besoin que l’on prenne soin de moi. Je ne parlais que de ça à tout mon entourage, mes collègues, aux personnes qui passaient à l’Institut pour suivre les cours de droit humanitaire, aux touristes avec qui je sympathisais…

Les seules personnes à qui j’évitais de trop en dire étaient mes parents. Partagée entre mon Déni et ma Colère et dans mon besoin d’aller jusqu’au bout, j’avais peur qu’ils ne me somment de rentrer.Un jour, alors que la fatigue avait eu raison de moi, et face à une crise d’angoisse plus forte que les autres, je craquais et leur demandais de venir me voir. Je bouillais de rage, je hurlais ma colère contre cette injustice, contre eux qui m’avaient créée avec cette maladie.

Lorsqu’ils sont arrivés,  j’avais perdu 8 kilos – j’étais en léger surpoids juste avant-. Leur venue me fit du bien. A nouveau, je retrouvais mon cocooning, les petites attentions. Je dormais mieux et la fatigue se faisait moins sentir. J’exprimais même le désir de leur faire visiter la ville, malgré quelques étourdissements. Bien évidemment, ils me communiquèrent leur désir de me voir rentrer avec eux.

Mais, une fois de plus, je résistais. Je ne voulais pas lâcher prise. Je considérais leur venue comme un baume qui avait pu m’apaiser et j’étais prête à repartir dans mon Déni. Il fallait que je puisse finir ce stage !

Ce que j'en pense aujourd'hui

Aujourd’hui, je me dis que cette période reste certainement la plus noire et la plus difficile de ces 9 dernières années. Chacun de ces moments vécus restent profondément incrustés en moi et les écrire a fait resurgir beaucoup d’émotions. A la différence avec la Tristesse par la suite, j’ai vécu cette période de Déni et de Colère de façon coupable. Une partie de moi se refusait à admettre le diagnostic, je sentais que je résistais, qu’il fallait que j’accepte ma nouvelle condition mais je ne savais pas comment laisser entrer cette information en moi.

Pourtant, le fait d’être en colère contre la maladie était nécessaire… Et si j’avais eu la connaissance que j’ai aujourd’hui, peut-être que j’aurais essayé de chercher à l’accueillir, la voyant comme un passage et non plus comme une fin ! Effectivement, la Reconstruction et l’Acceptation ne peuvent venir que lorsque nos émotions ont pu s’exprimer.

Mon exemple de la marmite qui bouillonne n’est pas si imagé que cela. Je bouillonnais littéralement, cela s’exprimait par des sueurs nocturnes, des pleurs de rage, une incompréhension totale de ce qui était en train de m’arriver. Et pourtant, ces émotions devaient s’exprimer ! Tout comme la Tristesse qui viendra par la suite.

 

Depuis que j’ai créé ce blog et que je corresponds avec de nombreuses personnes atteintes de la sclérose en plaques, d’autres maladies ou traversant d’autres épreuves, je me rends compte que beaucoup de personnes sont dans cette phase. Peut-être que ce sont celles qui sont le plus actives sur les réseaux sociaux. Par expérience, nous n’avons nulle part, nul interlocuteur vers qui diriger cette Colère pour la simple et bonne raison que personne n’est responsable de ce qui nous arrive.

C’est d’ailleurs pour cette raison que j’écris beaucoup sur le pouvoir de nos émotions.

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Cet article a 4 commentaires

  1. Anahita

    Les techniques de respiration (rebirth ou Trauma Release ou du même ordre) peuvent aider à libérer cette colère, à travailler avec les émotions qui ont suivi le choc et se sont cristallisées dans le déni.

    1. Lisa

      Je te remercie pour ce partage. Ce sont effectivement de supers outils. Je me permets de rediriger aussi vers ton autre commentaire, car tu mentionnes la kinésiologie que je trouve aussi être un très bon accompagnement.
      => chapitre 14 : émotions et sclérose en plaques

  2. Chaudre

    Je suis soit disant fibromyalgique les douleurs deviennent de plus en plus invalidantes je n ai plus la force physique et mentale pour me battre j ai eu un parcours de vie assez atroce quoi faire

    1. Lisa

      Votre commentaire est poignant. Comment vous soignez-vous ? Êtes vous accompagnée d’un point de vue thérapeutique ? Il est vrai que parfois des parcours de vie difficiles peuvent engendrer des traumatismes psychologiques et je suis convaincue que le corps y répond. Cela vaudrait le coup de vous faire aider, accompagner, soutenir …

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